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THE ISLAND OF DR. MOREAU (1996)

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Manu le 11/10/2012 à 21:22
4.5
Réalisé par John Frankenheimer
Avec Marlon Brando, Val Kilmer, David Thewlis, Fairuza Balk, Temuera Morrison.
Film américain
Genre : Drame
Durée : 1h 41min.
Année de production : 1996
Titre français : L'ile du Dr. Moreau
Musique : Gary Chang

Sortie Cinéma France : 08/01/1997
Sortie DVD France : n.c.

Les notes

4.5



 Critique THE ISLAND OF DR. MOREAU (1996)
Avis rédigé par Manu   |  le .   |  Note : 4.5
Six ans après Year of the gun, The Island of Dr. Moreau marque le come back cinématographique de John Frankenheimer après un premier retour « gagnant » à la télévision au milieu des années 90. Un come-back effectué quelque peu dans la précipitation puisque le cinéaste débarqua sur ce projet après le limogeage de son instigateur, le sud-africain Richard Stanley (au final crédité seulement comme co-scénariste), et le départ de l’acteur Rob Morrow, interprète du docteur Montgomery.

Une situation pas véritablement inédite pour Frankenheimer puisque 22 ans plus tôt, c’est également lui que l’on avait appelé à la rescousse afin de sauver de la déroute le tournage de la superproduction The Train … au final l’une de ses plus belles réussites. Malheureusement l’histoire ne va pas se répéter sur cette troisième version cinématographique de la nouvelle de H.G Wells, publiée tout juste cent ans plus tôt, et le tournage, mal commencé pour tous (Marlon Brando à peine remis de suicide de sa fille et apprenant que les français venaient de faire exploser une bombe atomique tout près de son île, Val Kilmer découvrant via les journaux que sa femme Joanna Whalley demandait le divorce, sans parler du renvoi de Stanley et du désistement de Morrow), vire rapidement au bordel cauchemardesque pour un Frankenheimer pourtant plus que rôdé à filmer dans des conditions difficiles. Les anecdotes ne vont pas tarder à fleurir sur les caprices de star de Val Kilmer, les pertes de mémoire d’un Marlon Brando parfois complètement aux fraises, tandis que Frankenheimer s’évertue à répondre aux exigences de la New Line, faisant appel à Ron Hutchinson, l’un des ses collaborateurs sur Against the wall et The Burning season, pour réécrire le script (Walon Green, scénariste de The Wild bunch et Sorcerer, aurait également participé à ce travail de réécriture). Signe de la bonne humeur régnant sur le plateau, on rapporte que Frankenheimer, après avoir bouclé la dernière scène impliquant le personnage incarné Val Kilmer, aurait lancé un « Cut. Now get that bastard off my set » (en français : Coupez. Maintenant, virez-moi ce connard de mon plateau ».

Autant de ragots qui n’ont évidemment pas joué en faveur du film. Ainsi, sans toutefois tenir de la catastrophe financière intégrale - Frankenheimer ayant de toute façon connu bien pire à ce niveau au cours de sa longue carrière – l’affaire Island of Dr. Moreau se solda assez logiquement par un échec au box-office, accompagné d’un déferlement de critiques négatives s’appuyant bien souvent sur le récit de sa gestation chaotique afin de valider la thèse de son échec patent. Aujourd’hui, bien que semble-t-il plutôt tenue en estime par les amateurs de cinéma fantastique, cette œuvre au statut tristement culte est encore largement considérée comme une « tâche » dans la filmographie de son auteur, lequel n’aimait d’ailleurs pas trop l’évoquer, si ce n’est pour louer le génie de Brando.

Je fais quant à moi parti des rares fervents défenseurs de ce titre. Loin du travail de commande anonyme que laissait craindre la brusque et tardive irruption de Frankenheimer sur le projet, cette Island of Dr. Island colle au contraire parfaitement au reste de son œuvre. Le récit d’HG Wells et la relecture moderne - voire plus précisément d’anticipation, puisque l’intrigue se déroule en fait au début du vingt et unième siècle - qu’il propose lui permet en effet de s’interroger - une nouvelle fois sans trouver de réponse - sur l’inadaptation quasi fondamentale de l’homme à la vie en société. Probablement, semble nous dire le film, parce que nous ne sommes rien d’autre que des animaux un peu plus évolués que les autres, guidés en conséquence par des instincts bestiaux incompatibles avec ce qu’impliquerait notre adhésion à toute forme de structure sociale. Un animal muselé donc, condamné à vivre dans un environnement intrinsèquement hostile.

Ainsi les personnages monstrueux croisés dans The Island of Dr. Moreau - qu’ils soient humains, dans le cas de Moreau et Montgomery, ou hybrides pour les autres - souffrent en définitive des même maux que le jeune héros en quête de liberté et reconnaissance de The Young stranger, premier film de Frankenheimer, Arthur Hamilton, l’homme d’affaire blasé s’achetant une nouvelle vie de Seconds, ou encore les parachutistes sans domicile fixe de The Gypsy moths.

Bien que porteur de préoccupations propres au cinéma de Frankenheimer, The Island of Dr. Moreau n’a toutefois rien d’un pensum moralisateur, le réalisateur de 7 days in May sachant comme personne enrober ses discours d’un emballage propre à divertir le plus grand nombre. Et dans la forme, il me semble que l’on tient là un travail en tout point exemplaire. Concise mais jamais bâclée, d’une élégance souvent virtuose dans ses nombreux mouvements d’appareil, la réalisation est un modèle de classe old school. Le genre de film où pratiquement chaque plan se déguste, dans lequel la maitrise de la tension, omniprésente, et l’intelligence du traitement de la violence (pratiquement toujours hors champ et pourtant palpable, pour ne pas dire pesante) impressionnent. 100 minutes d’efficacité brute d’une classe hors norme, en résumé …

Reste l’interprétation, qui ne peut que faire débat. Les détracteurs du film jugeront - non sans raison - les prestations des trois acteurs principaux en complète roue libre. J’avoue de mon côté considérer ces jeux hallucinés (David Thewlis), glissant promptement dans une ahurissante auto-satisfaction (Val Kilmer) ou tout simplement grotesques (Marlon Brando) comme faisant partie intégrante de la réussite de l’œuvre, collant audacieusement à cette ambiance de glissage dans une sorte de folie primitive réclamée par le sujet et recherchée par la mise en scène de Frankenheimer.

Une œuvre clairement excessive, suintant l’urgence - celle probablement d’en finir, pour bon nombre de ses participants - et le malaise, mais étonnamment solide et cohérente, qui me semble compter parmi les grandes réussites de John Frankenheimer, tant celle-ci, dans la forme comme le fond, parvient à concentrer l’essence même de son cinéma.


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